Par V. Vinogradoff, F. Duvernay, G. Danger, P. Theulé, et T. Chiavassa (Laboratoire de Physique des Interactions Ioniques et Moléculaires)
Les grains de poussières interstellaires dont la taille est de l’ordre de 0,1 µm sont constitués d’un coeur de silicates ou de matières carbonées. Lors de leur transit dans le milieu interstellaire ils peuvent se retrouver dans certaines régions appelées nuages moléculaires denses où les principaux éléments que contiennent ces nuages (H, O, N, C..) peuvent s’adsorber à la surface de ces grains, puis se combiner entre eux pour produire des molécules telles que H2O, CO, CO2, H2CO, CH3OH, NH3… qui forment des glaces interstellaires «primitives ».
Sous l’effet de processus énergétiques (UV, effet thermique) émanant des étoiles proches, la composition des glaces va alors évoluer et de nouvelles espèces neutres, ionisées ou radicalaires vont être produites pour conduire ultérieurement à la formation de molécules organiques complexes. La coagulation de ces grains conduira par la suite à la formation de comètes dans lesquelles des molécules encore plus évoluées vont se retrouver au sein d’une composante organique réfractaire. Ces comètes et météorites ont sans doute joué un rôle primordial en ensemençant la terre en molécules prébiotiques (acides aminé, bases puriques et pyrimidiques, sucres, acides gras), ou en précurseurs de celles-ci, qui sont les briques de base des molécules du vivant (protéines, acides nucléiques…).
Connaitre la nature de cette composante organique complexe est donc crucial pour bien comprendre l’évolution de la matière des nuages moléculaires au système solaire. L’objectif majeur des expériences en laboratoire d’une équipe de chimiste basée à Marseille au laboratoire PIIM, est de mettre en évidence le lien entre les grains cométaires ou météoritiques et les grains interstellaires primitifs contenus dans le nuage moléculaire. C’est dans ce cadre qu’ils viennent d’établir un lien entre H2CO, NH3 et HCOOH des glaces primitives et la formation d’une molécule appelée l’hexaméthylènetétramine (HMT) à une température de 300 K. Cette dernière est détectée en laboratoire dans les résidus organiques solides et elle est suspectée pour être présente dans les noyaux cométaires. La formation de HMT est purement thermique et ne nécessite pas de source d’irradiation ultraviolette. Le mécanisme de formation fait intervenir comme intermédiaire l’aminométhanol (NH2CH2OH) puis la méthylenimine (CH2=NH) qui est à l’origine de la formation de HMT. L’acide formique (HCOOH) joue le rôle de catalyseur. Jusqu’à présent le HMT était considéré comme un très bon indicateur pour mettre en évidence une évolution chimique induite par les photons VUV dans les glaces. Ces résultats au contraire relient la formation de HMT à une évolution des glaces interstellaires et cométaires induite par des effets thermiques.
Pour en savoir plus:
V. Vinogradoff, F. Duvernay, G. Danger, P. Theulé and T. Chiavassa, New insight into the formation of hexamethylenetetramine (HMT) in interstellar and cometary ice analogs A&A 530, A128 (2011)
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