Par Audrey Noblet, doctorante au LISA
L’eau liquide était stable à la surface de Mars au début de son histoire, mais les traces d’eau liquide étaient jusqu’à présent toutes localisées sur les hauts plateaux de l’hémisphère sud. Cette affirmation découle notamment de la détection de minéraux hydratés sur les hauts plateaux par les instruments OMEGA (Observatoire pour la Minéralogie, l’Eau, les Glaces et l’Activité) puis CRISM (Compact Reconnaissance Imaging Spectrometer for Mars) embarqués à bord de Mars Express et de Mars Reconnaissance Orbiter. Ces minéraux – comme les phyllosilicates – sont formés par l’altération de silicates par de l’eau liquide sur de longues périodes géologiques.
Tandis que des traces d’eau liquide sont détectées sur les hauts plateaux du sud, la surface les plaines du nord ne révèle que des roches volcaniques recouvertes de poussière. Cette hétérogénéité nord/sud se retrouve du point de vue géomorphologique : la planète est dissymétrique. L’altitude moyenne des deux hémisphères diffère de près de 10km, l’hémisphère nord étant moins élevée (figure 1). De plus les hauts plateaux du sud sont plus âgés que les plaines du nord, comme en témoignent le nombre et la taille des cratères d’impact.
Figure 1 : Planisphère de Mars. Le code couleur représente l’altitude relative par rapport à la valeur moyenne. (MOLA/MGS)
Plusieurs hypothèses ont été formulées pour expliquer cette dissymétrie, la plus probable étant un (ou plusieurs) impact géant qui aurait conduit à la formation d’un cratère d’impact sur la totalité de l’hémisphère nord. On ne sait pas à quel moment cet impact aurait eu lieu, probablement très tôt dans l’histoire de Mars. Ce cratère d’impact aurait été rempli par une « mer » de magma, formant ainsi les plaines du nord et effaçant toutes les traces du passé lointain de Mars.
Pour remonter dans le temps et retrouver les conditions antérieures à la formation de la couche de lave, des chercheurs d’équipes franco-américaines ont utilisé les instruments OMEGA et CRISM pour analyser la composition de la croûte révélée par certains gros cratères d’impact des plaines du nord. Ils sont parvenus à mettre en évidence la présence de plusieurs minéraux hydratés comme des phyllosilicates, au centre ou dans les éjecta de neuf cratères d’impact (figure 2).
Figure 2 : En couleur les neufs cratères d’impact dans lesquels des minéraux hydratés ont été identifiés. Les points noirs correspondent à des cratères d’impact dont la composition a été analysée mais n’a pas révélé la présence de minéraux hydratés. Carter et al. (2010)
Cette détection montre que l’eau liquide a été stable et répandue sur les deux hémisphères sur une longue période géologique. Cette information évoque un passé favorable à l’apparition de la vie, ce qui encourage la communauté scientifique à rechercher des traces de cette potentielle vie passée. Peut-être que profondément enfouies dans le sol des traces de vie auraient pu être sauvegardées au sein des argiles …
Pour en savoir plus:
J. Carter, F. Poulet, J.-P. Bibring, S. Murchie, 2010. Detection of Hydrated Silicates in Crustal Outcrops in the Northern Plains of Mars. Science 328, 1682-1686
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