Dans la rubrique “Trajectoires en Exobiologie”, des étudiants en thèses, sur des thèmes liés à l’exobiologie, racontent leur parcours. Sophie Dorizon, doctorante au LATMOS, répond cette semaine aux questions de la SFE.
Quelle est votre formation ?
Après mon bac S, j’ai fait une école préparatoire en maths physique. J’ai ensuite intégré une école d’ingénieur en géophysique, l’EOST (École et Observatoire des Sciences de la Terre) à Strasbourg. Pour finir, j’ai suivi le M2 Recherche OACOS (Océan Atmosphère Climat et Observations Spatiales) à Jussieu avec l’option télédétection, c’est à dire l’observation de la Terre et des planètes par satellite.
Pourquoi avez-vous choisi ce type d’études ?
Par intérêt avant tout, j’ai toujours voulu comprendre comment la Terre et l’univers « fonctionnaient », les volcans, les tornades, les tremblements de terre, les étoiles, les planètes, tout cela m’intriguait énormément quand j’étais petite, j’ai voulu des réponses, et plus j’en savais plus je trouvais ça fascinant ! C’est pour ça que je me suis dirigée vers une école d’ingénieur en géophysique, mais je ne m’attendais pas vraiment à ça : ce qu’on faisait était très appliqué, finalement, l’étude de la Terre, c’était surtout pour trouver du pétrole ou construire des bâtiments ! Grosse déception… Après mon école, j’ai failli m’arrêter là, j’ai galéré pendant 6 mois pour trouver du boulot mais rien ne m’enchantait vraiment, et les réponses négatives s’enchainaient. C’est là que je me suis dit que plutôt que de perdre mon temps, j’allais essayer un master avec une thématique qui m’intéresse vraiment, et j’ai trouvé le M2 en télédétection à Jussieu : là ça a été une révélation, j’ai passé une année passionnante avec des gens qui me ressemblaient vraiment, qui avaient le même état d’esprit et la même curiosité que moi.
Quel est votre sujet de thèse ? Où la faites vous ?
Je travaille au LATMOS (Laboratoire Atmosphères, Milieux, Observations Spatiales) en région parisienne, qui dépend de plusieurs universités et du CNRS. C’est un laboratoire où l’on étudie aussi bien l’atmosphère que l’océan ou le sous-sol, et on y prépare également des missions spatiales. C’est donc un cadre très enrichissant! Mon sujet de thèse porte sur la préparation d’un radar portant le nom de WISDOM (Water Ice Subsurface Deposits Observation on Mars) qui doit être embarqué sur un Rover pour aller sonder le sous-sol de Mars dans le cadre de la mission ExoMars, programmée pour 2018. Mon travail consiste à développer des outils informatiques qui permettront de « traduire » les données de notre radar en terme de géologie et de présence (ou non) d’eau dans le sous-sol de Mars. Le but est de fournir des cartes du sous-sol en 3D et de trouver des endroits intéressants (où on pourrait potentiellement trouver de la vie!) pour faire des forages.
Quel est le lien de votre sujet avec l’exobiologie ?
L’exobiologie est le cœur de la mission ExoMars. Le but, c’est de trouver des traces de vie dans le sous-sol de Mars, et WISDOM, notre radar, est là pour ça! Il sera capable de détecter la présence d’eau et de savoir si celle-ci est sous forme liquide ou de glace. De plus, on pourra identifier des couches géologiques et des structures complexes qui pourraient avoir préservé la vie ou au moins des traces de vie passée.
Pourquoi avez-vous souhaité faire une thèse ?
Pendant ma formation d’ingénieure et mon master, j’ai eu l’occasion de faire des stages dans des laboratoires de recherche et des entreprises, ce qui est super pour se faire une idée de ces deux mondes qui sont très différents. Et pour moi, il n’y a pas photo ! La recherche, c’est vraiment un état d’esprit, c’est avant tout comprendre, observer, c’est la collaboration avec des gens de tous horizons, c’est apprendre de nouvelles choses tous les jours, participer à des conférences, et éventuellement enseigner aussi. C’est un milieu où ce que l’on fait est très varié, et où l’on peut discuter de tout avec des gens passionnants et très accessibles. C’est donc tout naturellement que mon choix s’est porté vers une thèse après mon master, dans l’optique de continuer dans la recherche.
Mon meilleur souvenir et mon pire souvenir au laboratoire
Mon meilleur souvenir? Il me reste encore une année à passer au laboratoire, mais pour le moment, je dirais qu’il s’agit d’une campagne de mesures que j’ai faite dans des grottes glacées en Autriche avec notre radar. Le cadre était vraiment super, j’ai rencontré plein de gens de milieux très différents qui travaillaient sur des choses dont je ne soupçonnais même pas l’existence! C’est l’avantage quand on travaille en instrumentation spatiale, il faut tester le matériel dans des environnements différents, collaborer avec des équipes internationales, et donc voyager beaucoup. Le pire souvenir, ce n’est pas très original mais je dirais une semaine horrible passée à m’arracher les cheveux sur un programme qui ne donnait pas les résultats que je voulais… Et impossible de trouver une explication! J’ai fini par avoir un déclic après quelques temps et là c’était vraiment une libération! Morale: en recherche, il faut persévérer, même si on a l’impression d’être dans une impasse…
Et après ?
J’ai choisi d’enseigner au cours de ma thèse et je trouve ça tellement enrichissant que je ne me vois pas faire autre chose plus tard. Après ma thèse (déjà, il faut que je la finisse!), j’ai donc l’intention de poursuivre dans le milieu de l’enseignement et de la recherche, de passer les concours de maître de conférence dans les universités après quelques années de contrats type ‘post-doc’ : c’est nécessaire car il faut avoir un bon dossier avec déjà pas mal de travaux de recherche et d’heures d’enseignement pour prétendre à ces postes d’enseignant chercheur. En plus, il y a beaucoup de demande pour peu de postes donc ce n’est pas gagné, on verra bien, l’important c’est d’être motivé !
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