Par Grégoire Danger, laboratoire de Physique des Interactions Ioniques et Moléculaires (PIIM)
L’atelier intitulé « Photochimie en orbite », organisé par Jean-Claude Guillemin (ENSC-Rennes) et Grégoire Danger (PIIM-Univ. Marseille), s’est déroulé Salle de l’Espace au CNES le 8 novembre 2011 et a eu pour objectif de rassembler la communauté scientifique concernée par le développement de missions spatialespour l’étude de processus photochimiques et biochimiques en orbite. Cet atelier a été organisé à la demande de Michel Viso, directeur du programme Exobiologie du CNES, et du Groupe de Travail Exobiologie.
Le but était de demander à la communauté scientifique intéressée par cette thématique de réfléchir aux avantages et inconvénients scientifiques de telles expérimentations et à leur potentialité pour de futures missions. L’irradiation de matière organique dans la gamme UV est primordiale pour l’activation, et l’évolution de celle-ci au sein d’environnements très variables allant des nuages moléculaires, jusqu’au sein des systèmes planétaires comme dans le cas des comètes ou des astéroïdes, ainsi qu’au sein d’atmosphères planétaires.
L’atelier s’est déroulé en trois parties. Dans un premier temps, un état des lieux a été effectué sur les expériences en laboratoire permettant de simuler la réactivité chimique induite par la photochimie au sein d’environnements astrophysiques ou planétaires. Différentes présentations ont ainsi permis de présenter les dispositifs disponibles au sein de nos laboratoires pour simuler ces conditions d’irradiation, et notamment la possibilité de simuler séquentiellement le spectre solaire au sein du synchrotron SOLEIL (présentation Dr. Laurent Nahon), ainsi que de l’importance de cette photochimie que ce soit en conditions astrophysique (grains interstellaires ou cométaires, présentation du Dr. Fabrice Duvernay, PIIM Marseille) ou planétaire (photochimie au sein de l’atmosphère de Titan, présentation du Dr. Nathalie Carrasco, LATMOS). La seconde partie de l’atelier a permis de faire un état des lieux des différentes missions spatiales d’astrochimie en orbite effectuées ou en cours (Dr. M. Bertrand, Univ. Orléans). La plupart de ces missions ont consisté à étudier l’évolution de molécules organiques spécifiques soumises à l’irradiation solaire et autres rayonnements (acides aminés, base nucléique… Pr. Hervé Cottin, LISA ; ou ARN, Pr. Marie-Christine Maurel, AnBiophys), et de comparer ces données à celles obtenues en laboratoire, de manière à estimer la présence ou non d’une différence de réactivité. Malgré l’impossibilité d’utiliser des analyses in situ, les premiers résultats des expériences d’irradiation effectuées en orbite montrent des évolutions notables des composés.
Un autre aspect de ces missions spatiales en orbite est d’obtenir la validation de dispositifs pour de futures missions spatiales interplanétaires, de manière à tester la robustesse de ceux-ci, depuis le lancement jusqu’à leur présence en orbite où ils sont soumis à différents rayonnements qui pourront les dégrader lors de leur transit interplanétaire (résistance des biopuces au sein de l’environnement de l’ISS, Dr. Michel Dobrijevic, LAB). La troisième et dernière partie de l’atelier a consisté en une table ronde centrée autour de la question de l’intérêt scientifique d’effectuer de telles expérimentations en orbite. Pour une partie des personnes présentes, il ressort que les simulations en laboratoire doivent être un préalable à toute mission spatiale. Il a été noté qu’actuellement les apports scientifiques de telles missions sont faibles par rapport aux coûts qu’elles engendrent, surtout en comparaison des expérimentations en laboratoire. Cependant, il est indéniable que ce type de missions engendre des avancées technologiques significatives. De plus, les premières missions ont permis de faire évoluer les systèmes des suivantes, car les premières ne permettaient pas un suivi in situ des expériences embarquées, ni de régulation en température des échantillons. Les prochains dispositifs doivent permettre un suivi in situ par spectroscopie infrarouge et spectrométrie de masse, ainsi qu’une régulation en température des échantillons. Ces avancées technologiques permettront d’améliorer de manière significative les retombées scientifiques des futures missions en orbite. En ce qui concerne l’environnement au sein duquel doivent être mis en orbite les dispositifs, il a été relevé que la station orbitale internationale n’est pas le meilleur endroit, du fait d’importantes pollutions des échantillons provenant de la station. Pour ce qui est de la question centrale de cet atelier, à savoir l’intérêt scientifique de telles expérimentations en orbite, il ressort que le principal intérêt est la possibilité d’effectuer un traitement de plusieurs échantillons en même temps avec toute une gamme de rayonnement (UV, rayons cosmiques…) appliquée en une fois, ce qui est difficilement faisable en laboratoire. Cette approche permettrait d’évaluer l’impact de l’ensemble de ces processus appliqués en une fois sur un système moléculaire donné, par rapport à des études en laboratoire de ces mêmes processus effectués séparément sur le même système moléculaire. Enfin, pour ce que est des différents systèmes chimiques à étudier et expériences à effectuer, il ressort de la première partie de cet atelier, que nombre de réactions peuvent être proposées à partir des expérimentations déjà effectuées en laboratoire.
La complémentarité des expérimentations en orbite et en laboratoire a été particulièrement mise en évidence.
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